LE ONZIÈME CHOC


Insignes du 11ème Choc et de son successeur


Poignard de chef de Katiba :
attribut similaire à un "bâton de commandement"

Création le 12 juin 2012


En pleine guerre d'Algérie, les services secrets français apprennent qu'une cargaison est en cours d'embarquement dans un port démocratique et populaire de l'Europe de l'Est, à destination de l'Arabie Séoudite via Casablanca ! Il s'agit de " pièces détachées de matériel agricole ". Le cargo est mis sous surveillance, d'autant plus qu'il décharge ces " pièces détachées " sur un quai à l'écart. Quel hasard malheureux : la palette tombe à l'eau entre le navire et le quai. Aussitôt des hommes grenouilles marocains plongent et ramènent à la surface les " pièces détachées " qui sont embarquées discrètement vers un camp au sud de la frontière algérienne. Là, les colis sont chargées à dos de chameau. La caravane n'atteindra jamais sa destination …

Comme dans les films de James Bond, après l'introduction, passons au vif du sujet.

Le livre de Erwan Bergot sur le 11ème Choc est paru en 1988 aux éditions France Loisir.

Le 11ème Choc, unité d'élite, destinée à rester anonyme, est à l'écart des flons-flons des parades militaires. Il est spécialisé dans les coups fumants. Tous les États souverains ont leurs "forces spéciales" ... Alors pourquoi en parler ? Un petit coup de chapeau pour ces anonymes qui ont risqué, qui risquent et qui risqueront leur vie pour la France. Et puis, si tout n'est pas dit, il y a prescription pour le reste. Pour les actions actuelles, il faudra attendre un demi-siècle ...

Comme l'a proclamé le général Imbot en 1986 : "Vous êtes les héritiers de ceux qui ont choisi la modestie au panache, le silence à la clameur, la coulisse à la scène. Et la page d'histoire, que vous ajouterez à celles que vos aînés ont gravés, restera blanche. Pour longtemps."

Dès la fin du mois de juin 1940, l'état-major londonien du général de Gaulle estime indispensable la création d'un service de renseignements distinct de celui des Britanniques. En particulier, il s'agit de découvrir, de recruter et d'entraîner des volontaires. Ceux-ci constitueront le premier noyau des parachutistes de la France libre.

Puis, il apparaît indispensable de pouvoir compter sur des hommes qui, le cas échéant - insurrection ou invasion - seraient en mesure de rétablir des réseaux, voire de les susciter ... Les anciens cadres du contre-espionnage protestent, effarouchés par les méthodes utilisées : tir à toutes armes, close-combat, entraînement para ... :
- Mais nous ne sommes pas des agents "action" !
- Peut-être, mais vos adversaires, eux, le sont. Apprenez leurs façons, vous les combattrez mieux.

Jules Moch, Paul Ramadier sont bien conscients de la menace ... et deviennent les bonnes fées au berceau de la nouvelle unité "Choc".

Première base 1946 : la citadelle de Montlouis. Premier exercice : mettre la pagaille dans les grandes manœuvres de l'armée régulière. Jusqu'au général Inspecteur de la Manœuvre qui est fait prisonnier !

Deuxième base : Collioure. A l'issue du stage, chaque parachutiste est capable de se mouvoir, par tous les temps, et même de plonger à une dizaine de mètres de profondeur, d'amener son embarcation sur un navire de guerre, ou en débarquer, ainsi que s'initier aux techniques de montagne d'été - escalade, rappel, varappe - ou d'hiver : ski ou survie en neige (Montlouis,évidemment).

Puis c'est la guerre d'Indochine : peu à peu des officiers sont amenés à aider des maquis qui se battent contre les "Klouis" ( les Viets ) : les Hrés, les Méos ( Hmongs ). L'heure du 11ème Choc va bientôt sonner. Les Américains, anticolonialiste comme on sait quand il s'agit des autres, mettent des bâtons dans les roues aux Français, jusqu'au moment de la guerre de Corée, au cours de laquelle ils ouvriront enfin les yeux.

Les "centaines" du bataillon, comme on les appelle, sillonnent les maquis, découvrent la piste "Hô Chi Minh", invisible d'avion, et assistent, impuissantes, à la chute de Dien Bien Phu. Et pourtant ... un corps expéditionnaire Méo se présentera spontanément pour sauver le camp retranché : Un millier d'hommes, entourés de leurs propres officiers et de leurs sous-officiers, en tenue de route, pyjama noir, armement au complet, vivres et munitions pour une longue route. Le feu vert du commandement français ne viendra jamais. Tant pis pour les prisonniers français ( et de l'Empire français ) qui périront dans les camps viets.

Enfin c'est la guerre d'Algérie, l'impuissance des troupes "régulières" à contenir une rébellion qui croit en importance de mois en mois et se transforme en insurrection : c'est alors le verrouillage des barrages électrifiés à proximité des frontières et l'intervention du 11ème Choc totalement anonyme dans la zone franche où tous les coups tordus sont permis. Beaucoup d'héroïsme de part et d'autre, au fur et à mesure que le cordon ombilical de l'ALN se coupe dans la fureur des combats. C'est qu'il faut du cran pour ramper torse nu sous les barbelés et il faut du panache pour monter à la mort en bouton de manchettes et parfumé ...

Nous laisserons au lecteur la surprise de la deuxième moitié du livre, la manière dont les opérations ont été minutieusement préparées jusqu'à l'infime détail, ainsi que les vives réactions des Katibas face à cet ennemi à leur taille ...

Mais il y a aussi l'anecdote croustillante : un beau jour, un renseignement top secret vient de Paris, passe par Alger et va jusqu'à Colomb Béchar. Il s'agit d'escorter un élément de la Légion jusqu'à la frontière marocaine. Bien entendu il faut rester anonymes et nos commandos empruntent l'uniforme des chasseurs alpins. Ils ont pour objectif l'interception d'un important convoi d'armes, en tendant une embuscade à 1 heure du matin. L'imposant dispositif se met discrètement en place et à l'heure dite, un camion se présente. Surprise ! Il s'agissait d'un camion de légumes ... On ne saura jamais le fin mot de l'histoire.

L'histoire du 11ème Choc pourrait s'arrêter là.

Lorsque, le 2 octobre 1985, l'Assemblée Nationale a appris que le 11 ème Bataillon parachutiste de choc était recréé, le silence qui a suivi a montré que pas un seul des parlementaires présents n'ignorait la portée de cette résurrection, et n'en contestait la nécessité.





Provocation ? Prémonition ?